Je ne pouvais, ne serait-ce que pour quelques instants et la prise d’une photo, ne pas me rendre à la réunion que donnait Mélenchon au théâtre municipal de Tourcoing. Bien que le temps fût glacial et qu’une brume fort désagréable nous enveloppait, le spectacle, après tout nous étions au théâtre, fut, au sens propre, remarquable, tant par le talent du tribun de la plèbe qu’il se veut, que par le discours politique qui n’était pas sans rappeler les beaux moments de communion du mouvement ouvrier. « La lutte de classe est de retour » me glissa une connaissance venue là aussi en curieux et révolutionnaire désabusé.
Le discours de l’impétrant, tout de formules, avec des pointes de misérabilisme, mais restant toujours dans une volonté pédagogique de l’action ouvrière se voulait mobilisateur des classes populaires qui dans nos villes comme ailleurs souvent ont plutôt choisi de ne plus participer au théâtre électoral.
Sans faire d’anachronisme et sans ironie, Mélenchon peut-il relancer la marche en avant de l’avant-garde du prolétariat avec une vision nouvelle dans des formes qu’il appelle la révolution citoyenne où l’initiative individuelle et collective s’organise spontanément en utilisant notamment, ce qui semble efficace, vu le nombre de participants, de technologies nouvelles de communication et de débat mettant en place une démocratie populaire horizontale ? Ce n’est pas du bolchévisme mais cela peut être singulièrement mobilisateur.
Cet homme est cultivé. Il connait son marxisme, il sait y trouver la méthodologie de l’initiative historique en redynamisant les grands thèmes de la nécessité de la lutte et du combat ouvrier. Il s’adresse en ce sens à une société qui doit retrouver son sens de classe.
N’ayant pu trouver de place à l’intérieur du théâtre dont la salle à l’italienne, faite de stuc doré, de moquette et tapisserie rouges qui donnait un caractère insolite à la dramaturgie du discours, nous pûmes suivre le reste du spectacle devant l’écran géant installé à l’extérieur ou pour les plus frileux devant leur téléviseur.
Quant au fond, l’humanisme dont il se réclame parfois contredit sa vision trop purement économiste qui peut certes en désignant les adversaires de toujours, patronat ex-textile reconverti en l’occurrence dans Auchan et autres, la finance invisible et ses hommes liges de Bruxelles, réveiller quelque peu ceux qui auraient le plus besoin de se battre, salariés exploités, sans emploi, sans avenir, mais qui pour l’instant renvoient tout ce monde dans la même indifférence lointaine vis-à-vis des puissants et des prédateurs sociaux mais il faut aussi une vision culturelle, identitaire, nationale et morale pour mieux armer cette révolution citoyenne.
Renouer avec tout cela comme tente de le faire à leur place Dupont Aignan et dans une autre mesure LePen, c’est retrouver la conscience de classe liant combat et progrès social, identité, nation, république qui est au cœur du peuple français.
Mille cinq cent citoyens pour un spectacle politique qui à défaut de convaincre totalement mais dont la teneur faisant appel à la raison et l’intelligence collective a créé une atmosphère propice à faire croire à chacun que son engagement est possible et nécessaire. Pour cela que Mélenchon en soit remercié.
Allons pas de nostalgie, camarades, le monde nouveau est devant nous !